I sear it, I'm fine ! • Chlochlo & Maxou ♥

Wake me up when September ends

Assise sur une énième chaise de la salle d’attente aux côtés de June et Max’, Chloé fixa le sol d’un air vide en attendant que le médecin daigne appeler l’unique blessée du groupe.  Physiquement parlant, du moins – elle se sentait comme une bombe à retardement prête à imploser au prochain choc. Comme si le fait de ne rien pouvoir faire et de devoir laisser Lukas partir n’était pas suffisamment horrible à encaisser ; elle venait juste de réaliser que l’après-départ et l’absence seraient sûrement tout aussi invivables. Muette, elle esquiva une nouvelle pensée lorsque June déclara qu’ils auraient juste dû rentrer au lieu d’être ici. Si ça ne tenait qu’à elle, elle serait de toute évidence en chemin pour ramener Lukas, mais elle aurait tout au mieux fait de se jeter sous le premier train à ce niveau là. Le résultat reviendrait au même au bout du compte. Et puis, rentrer chez elle. Rentrer seule. Elle n’avait pas encore assez de recul sur la situation pour juger si l’idée était bonne ou non. Au pire des cas, elle pourrait toujours s’incruster chez son frère …  

Elle se leva sans broncher lorsque le médecin arriva, se plaçant inconsciemment derrière June pour l’empêcher de faire demi-tour au dernier moment. La brunette connaissait l’aversion de la famille pour les hôpitaux en général – Lukas avait quand même préféré lui recoudre la main un soir en plein milieu de l’autoroute plutôt que de la confier aux urgences - mais la Carter avait besoin de cette consultation, qu’elle pense le contraire n’aurait rien changé à sa présence ici. Max’ et elle était d’accord sur ce point. Et bien qu’elle n’était pas une personne bien imposante en soit, avec ses yeux rougis et son air dépité, s’il y avait un seul moment pendant lequel il ne fallait pas la contrarier, c’était bien maintenant. Suivant le couple dans la salle de consultation, elle s’assit au hasard et écouta Max’ raconter ce qui était arrivé d’une oreille absente. Mieux valait ne pas trop se remémorer les dernières heures –sous peine d’être admise directement à la place de June. Cette dernière s’étant levée pour être examinée, Chloé prit seulement la peine de pivoter le buste pour entendre le verdict du médecin. Un poids de moins non négligeable si tout allait bien pour au moins une personne dans la pièce. Ou carrément dans la famille. Baissant les yeux pour découvrir la main de Max’ sur la sienne, elle la serra brièvement avant de croiser les bras sur sa poitrine comme pour retenir ses poumons en même temps que son souffle. Elle tenta un sourire en guise de réponse lorsqu’il lui dit que ça allait aller ; sourire qui se résulta plus qu’autre chose en une moue douloureuse.

« Je crois que je vais demander une prescription pour des somnifères, quelque chose. J'ai juste besoin de faire le vide dans ma tête. »

Wake me up when September ends

Plantant incessamment ses ongles dans la chair de son bras jusqu'au sang comme si ça allait changer quelque chose à la situation, ou même améliorer son état second, Chloé fut sortie de sa rêverie passagère par la proposition que June énonça depuis la table d'examen - immédiatement soutenue par Max'.  Rester chez eux ? La partie la plus saine de son cerveau lui soufflait que c'était peut-être la meilleure chose à faire pour ne pas tourner folle seule à l'appartement. Elle se connaissait suffisamment pour savoir qu'elle était tout à fait capable de se morfondre toute la journée devant son téléphone en attendant un appel miraculeux de la NO. Ou de refuser de sortir de son lit pour aller travailler, ou essayer de rattraper son retard monstre à la FAC. De ce côté là il fallait qu'elle se fasse une raison ; elle allait devoir trouver un moyen de retaper son année avec une petite fille à sa charge. En espérant que Lukas soit rentré d'ici là ; elle refusait de penser qu'elle allait devoir passer le reste de sa grossesse seule à gérer les rendez-vous chez le médecin, les préparatifs de la chambre, les vêtements, sécuriser un appartement bourré à craquer d'armes ...

« J'y réfléchirai. Je veux pas déranger ... »

Parce que là était le vrai problème. Elle ne voyait pas en quoi elle allait se rendre plus utile à faire les cent pas chez eux. En quoi elle allait être autre chose qu'une charge de plus occupant la future chambre du bébé à venir. En parlant du bébé, le docteur leur assura qu'il allait parfaitement bien. Enfin une bonne nouvelle. Depuis son siège, elle soupira de soulagement en jetant un coup d’œil à Max', puis June. Cinq minutes dans une salle de consultation, et elle avait déjà trouvé le temps de menacer de planter le pauvre médecin. Typique des Carter. Le type n'avait plus qu'à espérer qu'elle n'était pas à portée des scalpels, sinon il allait réellement passer de spécialiste à client sans mains sans faire de détour par la case urgences. Finalement, June se rhabilla sans broncher avant de les rejoindre près du bureau où le docteur écrivait d'une façon parfaitement illisible les médicaments à prendre. Posant une main sur son ventre en attendant qu'il finisse de rédiger l'ordonnance, elle étouffa un bâillement éreinté. Trop de choses en une journée, elle voulait juste rentrer et se jeter dans le premier lit, pourquoi pas avec une paire d'écouteurs réglés au maximum pour brouiller ses pensées. Ouais. Elle allait carrément faire ça. Pas de nuques brisées, pas de carnage, pas de copain embarqué, rien. Sentant les larmes remonter bêtement, elle les chassa d'un revers de poignet avant de se lever brusquement de son siège pour se diriger hors de la salle. Une fois dehors, elle plaqua son dos contre le mur le plus proche, s'obligeant à respirer calmement. Tant pis pour la politesse ; le docteur avait failli perdre un doigt ou deux, il allait se remettre de son absence d'au revoir ou même de merci. Relevant la tête de ses mains lorsqu'elle entendit la porte s'ouvrir de nouveau, elle se racla la gorge et essuya par précaution les potentielles traces de maquillage restantes sur ses joues.

« Désolé pour ça, je crois que je vais rester chez vous un peu en fait, c'est pas une mauvaise idée ... »

Wake me up when September ends

Au bout du compte, June et Max' avaient sûrement raison : Elle n'allait jamais se sentir mieux si elle se cloîtrait chez elle en attendant que tout ça passe et se règle comme par magie. Alors autant essayer de se faire une raison et de mettre toutes ses chances de son côté pour s'en remettre un minimum. Si elle n'essayait pas de se secouer maintenant pour ne pas sombrer dans la dépression, elle plongerai directement là tête la première. Souriant de façon maladroite en voyant June poser sa main sur son épaule, elle ravala les derniers sanglots avant de détacher son dos du mur. Pour que June se mette elle aussi à un minimum de signes ostentatoires de compassion, elle devait être plus touchée qu'elle ne le laissait paraître. « Aller, on va rentrer et … je sais pas... s'occuper ! C'est une bonne idée non? Ça aurait cool de boire un coup mais enceinte ce n'est pas une bonne idée ! » Surtout en vue de la descente infernale que la brunette avait. Cette dernière ajoutée à la situation présente, elle n'imaginait pas ce qu'elle aurait pu ingurgiter en quantité si elle n'était pas enceinte -sûrement de quoi la noyer elle et le bébé dans la foulée. Elle allait devoir se rabattre sur quelque chose de plus sain pour se changer les idées.

Quand June répéta une nouvelle fois que la visite médicale était à ses yeux inutile, elle leva les siens au ciel. Elle n'allait pas s'en sortir comme ça indéfiniment, ne serait-ce que pour les échographies ou l'accouchement. Quoique, c'était une Carter. Rien ne disait qu'elle n'allait pas insister pour accoucher chez elle plutôt que de se faire traîner de force à l'hôpital. Dur à cuire jusqu'au bout - d'un côté, elle l'admirait pour ça ; personnellement elle préférerait qu'on lui flanque un bon coup de morphine. Ou de chaise. N'importe quoi pour la faire contrôler un tantinet ses émotions. Max' lui prit la main ; elle pressa rapidement sa paume contre la sienne pour le remercier de son soutien. Dans l'histoire, la personne qui se retrouvait avec le plus de choses à gérer était peut-être Max' - elle se considérait déjà comme un poids énorme à supporter. Alors qu'ils s'éloignaient de la salle d'attente aux patients curieux, Max' leur proposa une soirée calme pizza/TV. Dans l'état où elle était, elle aurait dit oui à tout. Alors avec la pizza, c'était gagné d'avance.

« Objection sur mes talents culinaires, je m'en sors pas mal. En règle générale. Une fois sur deux quoi ; en fait t'as raison va pour les pizzas, manquerait plus qu'on revienne ici pour intoxication alimentaire ... »

Passées les portes d'entrée, Max' lui demanda si elle voulait faire un détour à l'appartement pour chercher quelques affaires avant d'aller passer la soirée chez eux. Haussant les épaules en s'installant sur la banquette arrière de la voiture, elle jaugea l'état de ses vêtements actuels. Elle pourrait attendre demain ; l'idée de retourner chez elle seule ne l’enchantait pas plus que ça. Posant la tête contre la vitre pour perdre ses yeux dans la route, elle attendit que Max' démarre.

« Je me débrouillerai pour en ramener demain, t'inquiète pas pour ça. »

Wake me up when September ends

Le trajet jusqu'à chez Max'&June lui parut durer une éternité - l'inconvénient ultime d'avoir trop de temps à soit pour broyer le double d'idées noires. Il fallait qu'elle tienne le coup, qu'elle se fixe un planning, n'importe quoi pour la remuer de l'état léthargique dans lequel elle préférait mille fois se morfondre. C'était la méthode facile, l'échappatoire par excellence. Elle n'aurait aucun mérite à recevoir si elle faisait ça ; ni d'excuses franchement valables. Elle était persuadée que Lukas ne voudrait pas qu'elle déprime aussi facilement - si elle devait se raccrocher à quelque chose de concret, ça serait ça, à défaut de l'avoir avec elle sur la banquette arrière de la voiture de Max'. June lui proposa de lui prêter des vêtements, insinuant dans la foulée que niveau quantité de t-shirts, elle ne manquerait de rien. Hochant la tête pour la remercier, Chloé reporta son attention sur le goudron qui défilait sous ses yeux. Ils arrivèrent finalement à destination ; elle claqua difficilement la portière d'une main fébrile avant de les suivre vers la porte d'entrée. Acquiesçant lorsque June annonça qu'elle prenait sa douche - et que la brunette pourrait faire de même après - elle s'étonna de devoir piétiner sur place pour ne pas écraser un chien, ou plutôt un chiot - la bouille d'ange ne trompait jamais. Un chien, une maison, un bébé en route ; bizarrement le couple le plus "atypique" en faits qu'elle connaissait se rapprochait pas mal du cadre stéréotypé familial parfait. Distraite par l'animal, elle releva la tête lorsque Max' se proposa pour lui montrer la chambre qu'elle occuperait.

« Merci, mais il faut vraiment pas que ça dérange, je peux dormir sur le canapé sinon ! »

Elle avait trop l'habitude de materner les gens autour d'elle - ou de vouloir absolument s'occuper d'eux comme si elle était responsable d'une façon ou d'une autre du bonheur d'autrui. La situation ici renversée, elle était un peu, pour ne pas dire complètement, perdue. Le suivant sans rien dire, elle passa la tête par le cadre de la porte pour mémoriser sa chambre temporaire, ainsi que les autres pièces par déduction - suffisait d'entendre le jet d'eau pour deviner où était implantée la salle de bain. Une fois la chose faite, elle redescendit au rez-de-chaussée avec Max', qui s'occupa de commander les pizzas pour eux trois après lui avoir dit qu'elle pouvait faire comme chez elle. Elle choisit une pizza tout ce qu'il y avait de plus basique, n'étant jamais vraiment sûre de ce qu'elle avait le droit de manger ou non. Au stade avancé de sa grossesse, elle voulait être sûre que le bébé irait bien -  même si les coups subtils qu'elle avait l'impression de recevoir dans le ventre par moments lui prouvait bien que tout allait dans cette direction. June ne tarda pas à arriver dans le salon, emmitouflée dans un t-shirt trois fois trop grand pour elle. Apparemment, c'était plus fort que tout : Les femmes enceintes se sentaient affreusement obligées de se glisser dans les fringues de leur copain. En parlant de fringues ....

« C'est gentil, merci, je te les rendrai quand j'aurai le courage de faire une machine. »

June lui prêtait des vêtements, les laver avant de lui rendre lui paraissait normal, voir le seuil minimum de politesse. Sans ajouter un mot, elle fila dans la salle de bain, prenant conscience des bienfaits de la douche qu'une fois plantée sous la pression de l'eau chaude. Elle en profita pour se laver rapidement les cheveux, attrapant une bouteille de shampoing au hasard, avant de sortir de la cabine pour enfiler les vêtements qui prônaient en pile. Son ventre proéminent tendait un peu trop le tissu à son goût ; elle tenta en vain de l'étirer vers le bas, sans succès. Résignée, elle rejoint discrètement Max' et June dans le salon, s'asseyant en tailleur à l'autre bout du canapé.

« Une chance pour qu'il y ait quelque chose de potable à la tv pour attendre les pizzas ? Je meurs de faim ... »

Wake me up when September ends

Recroquevillée dans son coin sur le bout du canapé - habitude stupide que celle de s'effacer momentanément lorsqu'elle se trouvait dans la même pièce qu'un couple - Chloé regarda Max' quitter le salon pour prendre à son tour sa douche. Fixant la tv éteinte devant elle, elle déposa ses paumes sur son ventre. Il fallait le dire, les ventres de femmes enceintes, il n'y avait pas mieux comme accoudoirs de fortune. Elle finissait même par s'habituer à l'énormité de son propre bidon ; sauf pour le soucis ultime qu'était devenu la garde-robe et le shopping. En soit, elle n'était pas fan des vêtements de maternité ; les t-shirts de Lukas lui convenait plus. La taille, l'odeur familière, un peu tout en fait. Autre habitude entretenue par sa petite personne.

Jetant un coup d’œil vers le t-shirt tiré au niveau de son bas-ventre, elle se demanda un moment si le bébé pouvait ressentir l’atmosphère déprimante qui planait autour d'eux. Le départ de Lukas, la culpabilité, le stress, tout ça. Parce qu'elle s'interdisait fermement de lui transmettre cela ; même si le coup qu'elle avait reçu un peu plus tôt à la fête foraine lui prouvait malheureusement que d'une façon ou d'une autre, mini-elle savait que quelque chose n'allait pas bien. Déplaçant une de ses paumes de haut en bas comme pour la réconforter, Chloé écouta la remarque de June sur Domo - elle nota au passage le nom de l'animal dans sa mémoire pour s'en souvenir à l'avenir. Les chiens ne la dérangeait pas spécialement, ni les chats. Ni la totalité des animaux de compagnie ; elle n'en avait jamais eu étant gamine à cause de la facette maniaque de sa mère. Pour cette dernière, "animal" rimait plus avec bactéries, griffes sur le canapé, et responsabilités inutiles qu'avec "compagnie".  « J'ai pas eu l'occasion de te le dire mais, je suis désolée pour Lukas. C'est de ma faute s'il a du partir et... ouais... C'est toujours de ma faute... » Relevant la tête vers June, elle la fixa d'un air incrédule pendant quelques secondes. Si quelqu'un était à blâmer dans l'histoire, c'était Rebekah. Ou Klaus. Ou celui qui avait inventé la cure. Ou le premier loup-garou sur terre. On pouvait remonter loin comme ça, mais dans aucun cas June ne se trouvait sur la liste des personnes coupables. Ni pour aujourd'hui, ni pour ce qui était arrivé à sa mère et son frère. Ça la tuait littéralement de se rendre compte à quel point la Carter était rongée par la culpabilité.

« C'est la faute de personne, June. On a joué, on a perdu. Fin de l'histoire. »

Ils avaient perdu la cure. Ils avaient perdu Sayanel. Ils avaient perdu Lukas. C'était tout ce qu'elle retenait de cette journée. Sans répondre, June alluma le poste de télévision à la recherche de quelque chose pour passer le temps - à en juger par la vitesse à laquelle elle zappait absolument chaque chaîne de façon frénétique. Finalement, les pizzas arrivèrent plus rapidement que prévu. Laissant June se diriger vers la porte d'entrée - non sans appeler Max' pour le prévenir - elle se redressa un peu de la position avachie dans laquelle elle s'était installée. Son ventre gargouilla ; à croire que son cerveau avait déménagé dans son estomac. De toute manière, dès qu'elle était triste elle mangeait pour combler le vide. A l'instant T, elle avait l'équivalent d'un trou noir au niveau du cœur. June revint avec les pizzas, Max' les assiettes et la boisson. Marmonnant un "merci" lorsque qu'il leur souhaita bon appétit, elle mordit dans sa part de pizza, ignorant la brûlure qu'elle venait de causer à sa langue. Max' brisa le silence en premier, blaguant en lui disant qu'il espérait qu'elle était moins chiante que June comme femme enceinte. Levant les yeux au ciel, un sourire au coin quand même arraché par la tentative d'humour, elle avala une énième bouchée de pizza avant de répondre.

« Ça je sais pas, on verra bien avec le temps ; plus que trois mois pour juger ça. »

Trois petits mois et elle pourrait tenir sa fille dans ses bras ; en espérant que Lukas soit rentré pour pouvoir en faire de même. D'ici là, elle avait tout le temps de prouver qu'elle était assez facile à vivre comme femme enceinte. Max' lui répéta ensuite que si elle avait besoin de quelque chose, elle ne devait pas hésiter.

« J'ai juste besoin de ne pas être seule. Même si j'avoue, d'accord, que j'avais carrément besoin de cette pizza ! »

Wake me up when September ends

Attrapant une seconde part de pizza dans la boîte posée en équilibre sur la table basse, Chloé s'enfonça davantage dans le canapé pour pouvoir la manger tranquillement - fichu mal de dos qu'elle se coltinait depuis le cinquième mois de grossesse. A croire qu'elle avait un gabarit dix fois trop petit pour être normalement enceinte. Ce qui en soit n'était pas si faux que ça. Avec sa pizza depuis son bout de canapé, elle jeta des coups d’œils à ses amis. Elle n'était pas jalouse de nature - la jalousie maladive chez certains avait même plutôt tendance à lui taper sur les nerfs - mais pour le coup, les voir se taquiner en s'envoyant des remarques sur le port de t-shirt de Max' par exemple la rendait anormalement amère. Rien de bien méchant ; juste un cocktail sympa d'hormones et de tristesse de ne pas avoir Lukas avec elle maintenant et peut-être pour les mois à venir. Il avait intérêt à trouver un moyen de la contacter, parce qu'elle n'allait pas supporter de ne pas savoir s'il allait bien ou non - elle ne connaissait pas suffisamment les originaux pour savoir ce dont ils étaient capables. De beaucoup pour "peu", apparemment, vu toute la théâtralité de Klaus pour récupérer une cure dont il n'allait sûrement pas se servir. Il ne restait plus qu'à espérer que sa psychopathe de sœur était plus soft.

Silencieuse, elle réfléchit à la remarque de Max' un peu plus tôt. Elle était définitivement chiante comme femme enceinte si on considérait que son inquiétude quotidienne normale était amplifiée par au moins dix. Et son appétit aussi. Mais elle arrivait difficilement à considérer ça comme un problème majeur. Souriant malgré elle en voyant June se plaindre des coups qu'elle recevait de la part son enfant, elle se retint de lui dire qu'elle n'était pas au bout de ses peines. Il y avait des jours sans, où mini-elle devait être trop crevée pour montrer des signes de vies, et les jours avec, où pour le coup c'était la carrément la samba dans son ventre. Il y avait difficilement un entre-deux ; deux, trois coups bien placés par si par là de temps à autres dans les côtes puis silence radio. La première fois qu'elle l'avait sentie bouger, il lui avait fallu dix bonnes secondes pour comprendre avant de passer par la case Bisounours. Désormais, elle était plus habituée qu'autre chose ; maintenant qu'elle avait compris qu'en plus de cela, mini-elle décidait de se manifester seulement si une voix extérieure l'intéressait plus qu'une autre. Elle faisait déjà sa difficile là-dessus, mais quand elle était contente, elle le faisait définitivement bien sentir. Max' lui demanda justement si mini-Chloé - elle sourit en entendant le surnom - avait aussi décidé de faire ressortir son côté Carter. Son côté Carter ? Elle le ressentait un peu trop parfois quand elle décidait d'attaquer pendant que la brunette essayait de dormir.

« T'imagine même pas, à cette allure là je suis presque sûre qu'elle a déjà décidé d'entamer l'entraînement ! »

Elle plaisantait là dessus, mais la question lui revenait souvent à l'esprit. Est-ce qu'elle obligerait sa fille à s’entraîner aussi jeune comme les autres Carter ? Où est-ce qu'elle attendrait que cette dernière ait l'âge pour décider d'elle-même ? Elle ne se sentait pas de lui imposer une chose pareil - allez dire à une gamine de huit ans qu'elle doit savoir décocher une flèche parfaitement pour ne pas se faire assassiner - mais elle refusait catégoriquement dans la même mesure qu'elle soit incapable de se protéger si quelque chose arrivait.

« Vous pensez entraîner votre enfant d'ailleurs ? »

Peut-être que des avis extérieurs pourraient l'aider un peu à sur ce point là - même si pour June et Max' la décision devait être deux fois plus dure à prendre. Ils n'avaient plus la cure ; l'enfant aurait le gène de son père, et un entraînement de chasseur ne semblait pas la chose la plus saine pour éviter un meurtre accidentel ou volontaire qui activerait ce même gène.

Wake me up when September ends

Elle voulait juste une vie normale pour sa fille. Une rengaine affreusement répétitive entre l'école, la maison, les activités extra-scolaires, les week-ends, tout ce dont elle pouvait avoir envie. N'importe quoi. Vraiment n'importe quoi d'autre. Mais l'idée de devoir lui confier une arme dans les bras la terrifiait plus qu'autre chose, alors que mini-elle n'était même pas encore née. Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher d'y réfléchir déjà. Un arc pour une gamine de huit ans ? Ça n'avait rien de bien extraordinaire si le but premier était seulement de tirer sur une cible dans le jardin. Quand la cible se transformait en monstre ; le problème se posait plus. Étrangement, elle se sentait presque obligée de penser à toutes ces choses en l'absence de Lukas - comme si son départ justifiait un besoin soudain de se torturer l'esprit avec toutes les questions existentielles qui pouvaient lui traverser la tête. Comme si elle était censée réfléchir à l'avance pour deux personnes - bien qu'apparemment, même avec un couple entier, l'indécision persistait - il suffisait de voir Max' et June lorsqu'ils parlaient des difficultés qu'allait engendrer un entraînement pour un semi Carter doté du gêne lycan.

« Je ne sais pas trop, en fait. Je ne veux pas totalement bafouer ce côté de la famille, mais il y a aussi le mien en jeu. Et personnellement je préférerai qu'elle en reste aux bases de défense. »

C'était une solution potentielle, un compromis discutable mais juste : Lui apprendre à se défendre, à défaut de se battre. A se protéger, à défaut d'attaquer. Si seulement ... Le problème résidait aussi dans la location. Mystic Falls, petite bourgade et tout ce qu'on avait pu vous raconter de bien et de beau dessus. Il semblerait que les offices de tourisme aient oublié de mentionner la possibilité assez probable de se faire vider par la carotide au coin de la rue. Le business avant tout ; les dommages collatéraux après. S'amusant à pousser avec sa paume dans le sens inverse des coups qu'elle recevait de la part de sa fille - ce qui avait le don de lui en faire taper le triple, Chloé esquissa un sourire lorsque June remarqua que quelqu'un allait bien devoir reprendre l'entreprise familiale un de ces jours, quand ils seront vieux. Bon sang, elle avait déjà l'impression d'avoir pris dix ans d'un coup avec l'annonce de sa grossesse à seulement vingt-deux ans. Pas franchement l'âge conventionnel, et sa mère ne s'était pas gênée pour lui faire remarquer. Mais tout était si peu conventionnel depuis qu'elle avait déménagé ici qu'avec un peu de recul, elle s'y faisait. N'empêche, imaginer leurs enfants à leurs âges reprendre l'armurerie lui fichait presque autant le cafard que le coup de l'entraînement un peu plus tôt.

« A ce sujet là, si jamais vous avez besoin d'aide à l'armurerie, je suis là. »

Elle avait encore son job de serveuse à mi-temps au Mystic Grill, mais elle avait un peu perdu la motivation et la forme pour courir entre les tables et valser entre les commandes. Elle pourrait toujours gérer la caisse à l'armurerie - elle était archi nulle au niveau armes, mais la comptabilité commençait à rentrer petit à petit. Et puis, un poste assis toute la journée, le paradis pour contrer ses courbatures. Alors qu'elle se demandait si elle pouvait négocier un congé maternité avec son patron actuel, Max' ajouta au discours précédent de June, rappelant la perte de la cure. Rien que d'y penser, elle grinça des dents. Ils avaient été impuissants face à toutes les pertes. Celle de la cure. Celle de Sayanel. Celle de Lukas. Et la culpabilité était palpable. « Mais il faut au moins qu’il sache se défendre et pareil pour vous. » Ils étaient au moins d'accord là dessus. Esquissant un bâillement, elle abandonna sa dernière part de pizza.

« Il n'y a pas d’hésitation là dessus. De toute façon, je pense qu'elle ne manquera pas d'un modèle féminin Carter fort, heureusement que t'es là pour ça June !»

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Elle ne s'était jamais vraiment considérée comme quelqu'un de fort, autant physiquement que mentalement. Il suffisait de regarder ses bras gringalets - elle ne risquait pas de faire peur à quiconque avec ça, ou même avec quelle facilité elle s'effondrait au moindre soucis. La seule chose qui tenait un peu près la route chez elle restait son cerveau ; et juste qu'à preuve du contraire, jamais personne n'avait assommé un vampire à coup de bon sens. June lui avait toujours paru plus ... résistante. A la limite de l'hermétique. Peut-être qu'il ne s'agissait que d'une façade, mais au moins, elle savait bien la maintenir. En même temps, être une des rares filles dans une famille pareil avait du lui forger cette force là. La brunette, elle, n'avait aucun mérite à avoir fini son enfance en tant que fille unique. Elle n'avait rien eu de bénéfique à retirer de cela.

Jetant un regard vers la Carter en question, elle s'étonna presque de sa réaction - mais acquiesça par dépit lorsqu'elle ajouta que mini-elle devrait peut-être éviter de s'inspirer de son talent à s'attirer des ennuis. Bon, pour le coup, elle n'avait pas tort. Entre les jambes cassées, les homicides, les départs volontaires incessants, ceux en revanche qui s'apparentaient plus à des kidnappings ... Cette espèce de malédiction ne s'acharnait pas que sur June ; mais bien sur la totalité de la famille. Et sur toute la population masculine de Mystic Falls, il avait forcément fallu qu'elle tombe amoureuse d'un des Carter. Forcément. Au moins, d'une certaine façon, sa malchance récurrente allait très bien avec le reste de sa belle famille. Trop occupée à essayer de mentalement - et lamentablement, calmer les mouvements brusques du bébé, Chloé fut tirée de sa concentration par une nouvelle remarque de June. Si mini-elle se choisissait un chéri loup-garou ? Elle grimaça légèrement. Maxwell était le bon exemple du petit-ami loup-garou, elle n'en doutait pas une seconde, mais en vue de ce qu'elle avait elle-même personnellement vécu, l'idée ne l'enchantait pas plus que ça. Max' profita de son silence pour sur-enchérir sur le fait que Lukas finirait plus par écarter toute présence masculine autre autour de leur fille. L'idée lui arracha un sourire.

« Lukas ? Je le vois bien faire ça, oui. Je planquerai les armes pour ne pas finir avec un gendre criblés de flèches ! »

Et c'était reparti pour les discussions déclinées au futur, d'un coté, ça lui changeait efficacement les idées. Elle avait beau avoir l'idéal de la maman cool en tête, elle savait qu'elle allait sûrement finir en maman stressée à l'approche des premiers copains sérieux. Ça la tuait d'y penser déjà. « Et toi June ? Quand il nous ramenera des filles, tu seras quelle genre de maman ? Et toi Chloé ? »

« Quelle genre de maman je serais quand elle nous ramènera des filles ? »

C'était facile comme plaisanterie, mais elle en avait besoin. Reprenant son sérieux, elle songea à la question. Ses sourcils froncés trahirent sa réflexion. Quel genre de maman elle serait ?

« Honnêtement, je n'en sais rien. Si ça trouve, je vais découvrir que je suis aussi bonne à la chasse qu'à la maternité. Et dans ce cas là, je la plaint d'avance. »