Gabriella - "peu importe qui tu deviens, n'oublie pas qui tu es"

" C'est pas moi, c'est le vent ! " dis-je avant même que Sidjey me fasse remarquer que mon tir n'était pas glorieux... mais la petite moue que j'affiche parle d'elle même. Je me sens honteuse et fatiguée. Après une journée d'entrainements, j'avoue ne plus faire d'efforts pour rester concentrée et, face à l'enthousiasme de ma sœur lors de nos séances en duo, j'essaye de faire bonne figure malgré tout.  " On peut faire une pause ? J'ai envie de pizza. " La belle excuse me direz-vous mais, lorsqu'on a une sœur jumelle qui tire plus vite que son ombre et mieux que Lucky Luke en personne, il faut avoir une sacrée imagination pour s'éclipser en douceur. J'ai l'impression d'être une gamine qui peint avec ses mains crasseuses alors qu'elle a Salvador Dali à ses côtés... Puis, faut bien une pizza pour me faire oublier mes résultats d'aujourd'hui et, peut importe s'il n'est que cinq heures du soir. Oui oui oui ! Sidjey a beau me connaître par cœur, elle ne peut pas refuser une pizza maison, faite avec amour et par les soins de sa "petite" sœur adorée, si ? Un sourire -à peine- forcé sur mes lèvres, je la tire vers moi et lui arrache des mains la cible criblée de trous. " Allez, s'il te plaaaait ! " Non loin, Arès et Ghost non non, il n'y a ici aucune référence à GOT ou GW XD nous rejoignent en courant, excités par le haussement de nos voix. J'essaye de tenir la feuille, seule preuve matérielle de mes tirs chaotiques, loin de la portée de ma sœur mais, elle arrive quand même à me la prendre des mains. Décidément, ce n'est vraiment pas mon jour... Vaincue à nouveau, je lève les yeux au ciel et récupère le petit arsenal avant qu'on ne reprenne la route de la maison.
Nous avons beau nous entrainer depuis plus de 7 ans, je dois admettre que les armes à feu ne sont pas mon truc. Certes, je saurais me défendre en cas de besoin et si quelqu'un s'en prend aux miens. C'est quelque chose de vraiment génial et, croyez-moi, je suis consciente de la chance que j'ai de partager cet héritage avec ma soeur et Logan. Cela dit, je ne sais pas... il y a un truc qui me dérange chaque fois que je dois en utiliser une. Ce n'est pas l'arme ni la chasse qui me gêne en soit, loin de là. Mais le danger que cela implique me saute aux yeux constamment ; la possibilité que cela puisse se retourner contre nous, que nous perdions un membre de notre famille bêtement... Non, pas bêtement ! Je sais à quel point c'est important de savoir se défendre et, surtout, de savoir défendre sa famille des êtres qui nous guettent mais, c'est plus fort que moi... je n'arrive pas à être aussi enthousiaste que Sid face à tout cela. Est-ce cette soit disant paix qui a fini par me lasser ? Surement, je ne sais pas vraiment... Tout ce que je sais, c'est que parfois, j'aimerais qu'on puisse aller au cinéma le samedi soir, que l'on joue au monopoli les jours de pluie ou.... que l'on se tape des marathons séries les soirs de pleine lune. Vous voyez ? Le genre de trucs qu'une famille normale fait... le genre de chose que nous ne ferons jamais.

Après, je ne suis pas une Carter pour rien et j'ai le sang aussi chaud que celui de maman. Si je n'aime pas les armes pour ce qu'elles représentent je peux me lancer tête baissée dans la foule pour crier haut et fort nos valeurs et nos mérites. Ma famille s'est battue assez longtemps pour que nous puissions vivre en sécurité (et ensemble !) donc, je ne vais pas faire l'exception. Loin de là ! " Tu crois que Logan mangera avec nous ? " Revenant à mes moutons, je liste silencieusement les choses que je pourrais mettre dans la pizza. Ne sachant pas si notre frère mangera avec nous avant de partir en soirée avec ses amis, je préfère en anticiper une qui conviendra à tout le monde...

" Gaby, je peux rester avec le toi le temps qu’ils rentrent ? " Assise dans mon lit avant même que Sid n'ouvre la porte, je lui tend des bras qui se veulent rassurants, mais qui contrastent avec mes yeux pleins d'inquiétude. Quelque chose de grave vient de se passer, je le sais, je le sens. A vraie dire, je tendais l'oreille depuis déjà un bon moment et, j'avais remarqué que Maman et papa s'agitaient comme jamais dans la maison. A cette heure, cela ne pouvait dire qu'une seule chose... et ce n'est pas bon signe du tout. J'en frisonne. Lorsqu'un de vos enfants vient d'avoir un accident de voiture, c'est déjà assez angoissant... mais lorsqu'il y a des morts et, que des gênes s'activent par la même occasion.... je vous en parle même pas. C'est tout simplement l'horreur. Maman a toujours veillé à ce que cela n'arrive pas et, j'avoue que nous lui devons bien ça. Les pleines lunes sont déjà assez chargées avec un seul lycan dans la famille, je comprends entièrement sa peur devoir l'un de ses enfants en devenir un lui-même. Je frisonne à nouveau... Dans mon lit, je tremble comme une feuille lorsque Sid vient se blottir contre moi et, instinctivement, je la serre fort fort fort... " Tu crois qu'il va bien ? " Drôle de question pour une drôle de nuit. " Suis bête ! Evidement qu'il va bien ! Il a dû boire comme un trou, c'est tout. Les parents sont partis le chercher parce qu'il pouvait pas reprendre la voiture... c'est... tout." Lorsque la porte claque, je sursaute. Les parents sont partis chercher Logan mais, nous, nous ne savons pas grand chose et ne sommes pas plus avancées. J'essaye de rester positive et de paraître forte mais, au fond de ma poitrine, mon cœur ne demande qu'à exploser. Parce que, non, il n'est pas "simplement" bourré comme un trou. Les parents ne se seraient jamais déplacés ensemble en pleine nuit pour aller le récupérer puis... si même cela aurait été le cas, Logan aurait préféré mille fois demander à quelqu'un de le raccompagner plutôt que demander à maman de venir le chercher. Merci la honte, surtout devant les copains... et la leçon de morale aussi !
Ce que nous craignions fut par la suite confirmé. Notre frère avait bel et bien activé son gêne cette nuit là et, comme papa, il était désormais un lycanthrope. Mon frère, un lycan... mais cela n'a jamais changé ma façon de le regarder ou de ne considérer. Sauf lors des entrainements au corps à corps, où même Sid avait du mal à le gérer mais, cela, c'est une autre histoire. Je dois même avouer que -parfois- je me sens jalouse mais, pour rien au monde, je ne voudrait vivre ce qu'il vit chaque mois. Lorsque j'essaye de me mettre à sa place, la douleur au creux de ma poitrine me revient. Il n'a pas seulement activé son gêne cette nuit là, il a aussi perdu un ami. Si je le sais bien entouré en ce qui concerne se transformations et la gérance de son nouveau corps, je sais que la perte d'un ami est encore plus dure à gérer... et je veux qu'il sache que nous sommes là pour lui.