Il vaut parfois mieux rester morte /w Kiprian

Il ne sait pas encore qu'un peu de lui est mort avec moi cette nuit

    Le soleil lui manquait. Deux ans que Juliet-Grace vivait dans l’ombre, sans pouvoir mettre un pied dehors lorsqu’il faisait jour. En été c’était encore plus dur à supporter : les journées étaient plus longues, allongeant les heures passée à l’intérieur à se tourner les pouces. Une seule solution à ce problème : obtenir une bague en lapis-lazuli. Ce qui menait Juliet un autre petit problème : il fallait qu’elle trouve une sorcière qui accepterait d’aider la vampire fauchée qu’elle était.

Pour le moment, son plan se résumait à traîner dans des endroits connus pour être des  « nids à vampire ». Avec un peu de chance, elle tomberait sur quelqu’un capable de lui indiquer une sorcière pouvant fabriquer un de ces précieux bijoux. Mais les jours passaient et impossible de trouver ce qu’elle voulait. C’était comme si Mystic Falls, auparavant grouillante de créatures surnaturelles, c’était vidée de ces dernières. Et Juliet avait du mal à croire que tous aient déserté à cause de la « menace » humaine. Elle même était revenue malgré cela. On revient toujours à Mystic Falls.

Ce soir-là, elle s’apprêtait à rentrer bredouille encore une fois. Et puis au détour d’une rue un peu trop fréquentée à son goût, elle l’avait croisée. Une adolescente rousse, rayonnante dans ses vêtements de maternité. Aussitôt, Juliet l’avait détesté. Elle haïssait absolument tout chez cette femme, de sa paire de ballerines bleues jusqu’à l’élastique dans ses cheveux. La vampire avait dû faire un effort colossal pour que sa soif ne soit pas visible. Mais elle la ressentait quand même, cette soif qui la prenait à la gorge pendant que ces yeux effleuraient ce cou frêle.
Ça avait été un jeu d’enfant d’attirer sa proie dans les bois, puis au bord du lac. Encore une gamine qui pensait que l’eau du robinet était mauvaise pour le bébé. Dommage, la verveine qui se trouvait à l’intérieur aurait pu lui sauver la vie. Sur le chemin, elles avaient discuté comme les vielles amies qu’elles n’étaient pas. Ça n’avait pas empêché Juliet de trancher la gorge de l’adolescente sans hésiter une seule seconde. Mais elle savait exactement ce qui venait juste après l’instant de pure félicité qui suivait sa chasse. Des remords.

Toutes ses barrières s’abaissèrent d’un coup, et l’horreur de l’acte qu’elle venait de commettre la frappa de plein fouet. Elle avait tué cette gamine par pure jalousie, parce que tout vampire qu’elle était, jamais plus elle ne serait mère. Et le pire c’était qu’elle n’avait pas eu la sensation de faire quelque chose de mal, juste quelque chose de très amusant. Elle savait que dans quelques minutes, elle se relèverait sans plus y penser et que la culpabilité qui l’étouffait s’évaporerait. Fébrilement, elle tenta de réanimer le cadavre de la rouquine avec du sang de vampire. En vain. Alors elle se contenta de pleurer, en essuyant tant bien que mal le sang autour de sa bouche qui trahissait son méfait.
Parfois, c’était dur d’être un monstre.

©LILLIADE

Il ne sait pas encore qu'un peu de lui est mort avec moi cette nuit

Tonight
We are young
So let's set the world on fire
We can burn brighter
Than the sun
Carry me home tonight
Just carry me home tonight
Carry me home tonight
Just carry me home tonight

Je courrais, musique dans les oreilles, le vent me fouettait le visage et je laissais aller mes pensées. Je repensais à mon entrainement que je venais de finir, non loin dans la forêt. J'avais réussi quatre vingt dix neuf fois sur cent à planter mes pieux en plein milieu de la cible installer par mon père. Nous avions aménagé un espace d'entrainement à l'autre bout de la forêt. C'était le coin à titrer des chasseurs de la famille Hewitt, retiré dans les bois. Je n'étais qu'à un pieu du sans faute depuis maintenant quelques semaines et ça m'agaçait d'échouer à chaque fois. J'accélérais un peu la cadence, il commençait à se faire tard. Le soleil se couchait et j'avais beau avoir mes armes en poche et mes cartes disséminés dans mes vêtements je n'avais pas vraiment la tête à chasser ce soir. A moins que... Je passais sur le sentier aménagé autour du lac quand j'entendis un cris. Je retirais mes écouteurs. Il n'y avait plus un bruit. Je continuais en trottinant pensant avoir rêvé quand un mouvement se fit entendre dans le bosquet voisin. Je m'approchai sans bruit du bosquet d'où provenait le mouvement et distinguai une silhouette féminine. Je me décalais légèrement et une autre femme était étendu à côté. Moi qui n'avais pas envie de chasser ce soir... Je n'allais pas avoir le choix. La jeune fille assise parterre venait de tuer celle qui était allongé sur le sol. Cependant, des gémissements arrivaient jusqu'à mes oreilles. Regrettait-elle son geste ? Restait-il une part d'humanité à ce monstre ? Je ne pouvais pas le savoir et ne voulais pas y penser. Elle avait tué une innocente et c'était inacceptable. Je me devais de mettre un terme à ces agressions. Je devais l'arrêter avant qu'elle ne fasse de nouvelles victimes. C'était mon devoir. Je devais faire perdurer l'héritage des Hewitt. Je sortis mes cartes. La vampire que je m'apprêtais d'attaquer ne semblait pas avoir repéré ma présence. D'un mouvement de poignet je lançai l'as de coeur dans la nuque de mon adversaire qui tourna légèrement la tête. Je jetai une deuxième carte entre les deux yeux de la tueuse et le pieu brandit me jetai sur elle.

En apercevant le visage de celle à qui j'allais assener le coup de grâce, je stoppai mon bras. Le pieu brandit dans sa direction, à quelques centimètres de son coeur je la dévisageai. C'était mon amie d'enfance. Juliet-Grace, nous avions tout fait ensemble, elle savait tout de moi et à l'époque je savais tout d'elle. Je n'avais plus de nouvelles depuis des années. Il faut croire qu'elle m'avait cacher sa vraie nature tout ce temps en gardant le silence... Juliet-Grace me toisai tout aussi choquée que moi. Les larmes continuaient de ruisseler sur ses joues. En cet instant précis je ne savais que faire...

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    Aussitôt elle porta la main à sa nuque. Qu’est-ce que… un as de cœur ? Vivement Juliet-Grace se retourna pour se retrouver avec un autre projectile entre les deux yeux. Si ça avait été une balle de bois, elle serait morte sur le coup. Bon sang qui se battait comme ça de nos jours ? La réponse fonça sur elle, un pieu dans les mains.
Juliet laissa échapper un hoquet de surprise en le reconnaissant. Celui qu’elle refusait d’appeler Ethan envers et contre tous. L’ami qui lui avait horriblement manqué ces dernières années. Le père de l’enfant qu’elle regrettait tant. Le chasseur qui allait la tuer dans la minute qui suivait.

Enfin c’était ce qu’elle pensait. Le pieu s’arrêta à quelques centimètres de son cœur. Il a été entrainé pensa-t-elle simplement. Ils l’ont formé pour me tuer. La peur qu’elle avait ressenti quelques instants plus tôt laissa place à un horrible sentiment de colère et de trahison. C’est avec ce cocktail d’émotions qu’elle commença à renouer timidement avec son humanité. Elle savait que quelque chose à l’intérieur se battait, elle ne savait juste pas quoi. Mais une chose était sûre, elle se sentait en cet instant plus vivante que jamais, même si la douleur qu’elle avait étouffé durant toute une année remontait tout à coup.

Juliet-Grace tomba à genoux et se remit à pleurer de plus bel, les deux mains serrées contre son ventre horriblement vide. Parfois elle ressentait encore les petits coups de pieds d’un enfant qui ne naîtrait jamais. Douleurs fantômes, comme pour les amputés qui veulent se gratter un pied qu’ils n’ont plus. C’était la première fois qu’elle revoyait Kiprian depuis le jour où il avait dû partir en cure de désintoxication. Elle savait qu’elle était enceinte à l’époque, mais avait décidé de ne rien dire pour préserver à l’enfant la douleur d’avoir un père drogué. Peut-être que s'il se rétablit s'était-elle dit...Il n’y avait plus personne à protéger de quoi que ce soit maintenant. Elle leva un regard plein de larmes sur le jeune homme en face d’elle. Qu’est-ce qu’elle pouvait bien dire dans cette situation ? Il la considérait comme un monstre venant de tuer une innocente. Il allait la tuer. Il avait hésité, mais il allait le faire parce qu’il était un chasseur et que c’est ce que les chasseurs font. Juliet-Grace se fichait bien de mourir. Mais elle ne voulait pas que la mémoire de leur fils meure avec elle. Les mots sortirent tout seul de ses lèvres.

« Tu étais papa, Kiprian. Tu étais papa et je suis désolée. »

C’était tout ce qu’elle avait réussi à articuler avant qu’un autre sanglot la secoue. Péniblement elle se releva. A présent ses genoux étaient tâchés du sang de sa victime, baignant dans une mare écarlate. Mais Juliet ne se sentait pas sale uniquement pour ça. Elle se sentait sale de tous les meurtres qu’elle avait commis sans y penser en rentrant de Nouvelle-Orléans. Elle se sentait sale du regard que Kiprian portait sur elle. Non, elle ne le laisserait pas ne voir en elle qu’une suceuse de sang sans âme. Un instant, son regard retrouva l’étincelle de courage qui l’animait avant sa transformation. Elle se saisit du pieu dans les mains de Kiprian et le jeta au loin. Il ne la tuerait pas avant qu'elle ait fini.

« Je suis un vampire, ajouta-t-elle tout bonnement, comme si le dire à voix haute aiderait à faire passer la pilule. »

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    Je restais le bras levé, crispé au dessus du coeur de mon amie pendant une durée indéterminée. Tout ce que nous avions pu vivre défilait sous mes yeux. Les deux gamins qui faisaient la course dans la rue et se stoppaient net devant les passages piétons. L'entrée au primaire et les devoirs fait en étude dans une classe où personne ne travaillait. L'entrée au collège, adolescent boutonneux que nous pouvions être : moi et mon look de skateur, elle et son air de petite fille sage. Enfin, l'entrée au lycée où tout c'était compliqué. J'avais tout fait et tout apprit avec elle : de l'apprentissage de la lecture à ma première fois... Et puis j'étais partis, pour rassurer mes parents, j'avais rencontré Aaron dans le New Jersey et avais apprit à chasser. Juliet-Grace avait quitté la ville sans explications durant mon absence et elle ressurgissait : différente. Morte. Tueuse. Buveuse de sang. J'avais du mal à encaisser la nouvelle. Ca faisait beaucoup. Je devais assimiler que ma meilleure amie était morte, que nous ne vivrons plus de bons moments ensemble, toujours aussi insouciants et que j'étais destiné à la tuer... Comme pour couronner le tout, Juliet-Grace débita spontanément ces paroles :

-Tu étais papa, Kiprian. Tu étais papa et je suis désolée.

J'eus un mouvement de recul à ces mots. C'était tout bonnement impossible. Nous avions fait un écart. Seulement un et j'étais protéger. C'était une erreur de parcours et Juliet-Grace avait eut des tonnes de copains. Comment pouvait-elle assurer que j'étais le père de son enfant -qui plus est inexistant ? Je ne pouvais concevoir que ce qu'elle disait était la vérité. C'était la seule chose qu'elle avait trouvé pour me déstabiliser ? Mon amie continuait d'être prise par de violents sanglots ce qui me fit douter mais je me ressaisit rapidement. Juliet-Grace s'était déjà redresser et était debout à présent. Je bondit sur mes pieds, près à riposter au moindre mouvement suspect. Je la dévisageais : elle était devenue manipulatrice, meurtrière, sans âme et sans compassion. Malgré ses pleurs elle me paraissait insensible. Avec sa rapidité surhumaine elle s'empara de mon pieu et le lança au loin. Être lié à mon adversaire du soir me rendait inefficace et beaucoup trop lent à mon goût. Elle planta son regard dans le mien et affirma son statut de vampire. Comme si je n'avais pas remarqué...! Elle me prenait vraiment pour un idiot ! Juliet Grace se fichait de moi. Elle réapparaissait au bout de plusieurs années et ne trouvait rien de mieux à faire que m'annoncer une fausse paternité et déclarer la bouche en coeur qu'elle suçait le sang des humains qui peuplaient ce monde. Énervé de m'être fait désarmer aussi facilement, je la plaquai violemment contre le tronc d'arbre voisin et lui demandais des explications, lueur meurtrière dans les yeux :

-Tu crois vraiment que tu peux manipuler ton meilleur ami aussi facilement ? Tu n'as jamais attendu d'enfant. Tu mens ! Regarde ce que tu es devenue !

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    Juliet-Grace aurait du se douter qu’elle ne pouvait pas juste rentrer à Mystic Falls comme ça, après deux ans d’absences, faire quelques victimes innocentes en chemin et retrouver son ancienne vie par la même occasion. Mais une fois coupée de son humanité, elle s’était sentie toute puissante. Pleine d’une force qui la rendait légère, alors qu’elle était vide de toute émotions. Jamais quand elle avait imaginé son retour, elle n’avait vu Kiprian autrement qu’en train de l’aider à se relever. C’était peut-être stupide, mais c’était comme ça : il avait été une constante dans sa vie et pour elle leur amitié était immuable.

Mais voilà où ils en étaient, à se battre dans un bois sombre, un cadavre à leur pied. La confiance que le jeune homme avait eu auparavant pour elle s’était évaporée au moment où ses yeux avaient rencontrés ses crocs. Furieux, il la plaqua contre un arbre. Rien n’aurait été plus facile pour elle que de se dégager, s’enfuir en courant et ne pas remettre les pieds dans cette maudite ville avant une centaine d’année, quand tout souvenir de la fille qu’elle était auparavant aurait disparu de la mémoire des gens. Après tout, Kiprian ne faisait pas le poids face à elle, c’était évident. Mais Juliet-Grace savait que prendre ses jambes à son cou n’était pas une option. Elle ne pouvait pas fuir toute sa vie : il était temps qu’elle assume ses conneries et sa grossesse était l’une d’entre elle. Mais elle ne s’excuserait pas pour ça, pas plus qu’elle ne s’excuserait d’être devenue un vampire : dans aucun des deux cas elle n’était totalement responsable de ce qui lui était arrivé.

« Tu crois vraiment que tu peux manipuler ton meilleur ami aussi facilement ? Tu n'as jamais attendu d'enfant. Tu mens ! Regarde ce que tu es devenue ! »

Bien, elle s’était attendue à ce qu’il la traite de monstre, abomination, sangsue ou autre surnom affectueux. Menteuse, c’était petit comme insulte. D’autant plus qu’il se considérait encore comme son meilleur ami. Peut-être qu’il y avait encore de l’espoir.

« C’est parce que tu es mon meilleur ami que je sais que je ne pourrais jamais te manipuler. Tu sais que je dis la vérité. Tu vas me faire croire que tu n’as pas cherché à me trouver quand tu es rentré en ville ? Que tu n’as pas sonné à ma porte pour te retrouver en face de parents outrés que tu leur rappelles la plus grande honte de leur vie : moi ? »

Ces yeux étaient secs à présent. Elle avait assez pleuré pour la soirée, assez pleuré pour toute une éternité en fait. Juliet-Grace savait qu’elle n’obtiendrait rien de ses larmes. Alors elle avait mué sa tristesse en rage. Elle ne se sentait pas mieux, mais au moins elle pouvait vider son sac. La jeune femme continua sur sa lancée, sans savoir elle-même si elle essayait de se justifier, de s’excuser ou de lui reprocher de ne pas la croire.

« J’étais enceinte de toi Kiprian et rien de ce que tu ne diras ne changera ce fait. Tu peux faire semblant de ne rien entendre, notre enfant sera toujours… sa voix ce brisa à nouveau, mais elle parvint à reprendre son calme. Je ne peux pas prouver que tu es le père, mais je sais que tu l’es. Parce que tu es la seule personne avec qui j’ai couché de mon vivant. Et jusqu’à preuve du contraire, les vampires sont morts et donc ne peuvent pas avoir d’enfant. Il ne reste que toi, dit-elle en se dégageant. »

Elle essuya son visage, plein de sang et de larmes.

« Oh et t’inquiète pas, je vis très bien le fait d’être un monstre sanguinaire, merci de me le demander, ajouta-t-elle d’une voix moins ferme qu’elle ne le voulait. »

Elle s’accroupit auprès du corps de l’adolescente et lui ferma les yeux. Elle avait dit s’appeler Liv.
Juliet ne niait pas s’être comportée comme une sérial killeuse sans foi ni loi. Après tout c’était un peu ce qui qualifiait sa condition de vampire. Sa foi, elle l’avait perdu en prenant conscience du monde supernaturel. Les lois humaines, elle avait arrêté de les suivre à l’instant où elle avait planté ses crocs dans la gorge de son assassin. Juliet-Grace était le monstre que Kiprian voyait en elle. Ça ne voulait pas dire qu’elle voulait le rester.

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    Si j'avais été un monstre, comme elle, j'aurais montrer les crocs. J'étais furieux. Furieux contre Juliet-Grace mais aussi furieux contre moi-même. Furieux de n'avoir pas passer plus de temps à la chercher. Furieux d'être rester plongé dans le passé, à la recherche de Vladimir et Svenja que je ne reverrais certainement jamais. Je n'avais même pas su protéger ma meilleure amie de la plus grande abomination du monde : le vampirisme. Je m'en voulais terriblement au fond. Je m'en voulais plus, que je lui en voulais à elle. Je me sentais coupable de ne pas avoir été là pour elle, au moment de ma cure. Je m'en voulais de n'avoir pas su la protéger de son ex petit ami violent et alcoolique qui l'avait certainement mis enceinte de force. J'avais échouer. Je n'avais pas su la préserver alors que je me l'étais promis après tout ce que nous avions vécu. J'avais merdé.

-C’est parce que tu es mon meilleur ami que je sais que je ne pourrais jamais te manipuler. Tu sais que je dis la vérité. Tu vas me faire croire que tu n’as pas cherché à me trouver quand tu es rentré en ville ? Que tu n’as pas sonné à ma porte pour te retrouver en face de parents outrés que tu leur rappelles la plus grande honte de leur vie : moi ?

Juliet Grace ne pleurait plus et effectivement elle avait raison. J'avais tenté de la retrouver mais pas suffisamment. J'avais cru le mensonge de ses parents : elle était partie en voyage. Elle avait quitté la ville et ne donnait plus de nouvelles. Je n'avais pas chercher plus loin. Leur réponse me permettait de comprendre pourquoi les lettres que je lui avais adresser en cure étaient rester sans nouvelles mais je n'avais jamais compris. Jusqu'à maintenant, j'étais à des lieux de penser que les Overbey m'avaient mentis. Sans même me laisser en placer une, elle continua, toujours aussi sûre d'elle :

-J’étais enceinte de toi Kiprian et rien de ce que tu ne diras ne changera ce fait. Tu peux faire semblant de ne rien entendre, notre enfant sera toujours…Je ne peux pas prouver que tu es le père, mais je sais que tu l’es. Parce que tu es la seule personne avec qui j’ai couché de mon vivant. Et jusqu’à preuve du contraire, les vampires sont morts et donc ne peuvent pas avoir d’enfant. Il ne reste que toi.

Elle se dégagea et je n'opposai aucune résistance. Je ne savais pas quoi dire. Je ne voulais pas la croire. Je ne pouvais pas la croire plutôt. Pour moi, elle avait toujours été en avance. Elle avait toujours tout fait avant moi et sa première fois ne faisait pas exception à la règle. Je ne comprenais plus rien. Je ne savais si elle me retournait le cerveau volontairement où si j'étais en plein déni. Jamais elle ne m'en avait parlé auparavant. Notre écart datait de deux mois avant mon départ dans le New Jersey. Pourquoi n'avait-elle rien dit ? Nous étions amis, meilleurs amis. On pouvait tout ce dire et jamais elle n'avait laisser transparaitre qu'elle attendait un enfant. De quoi avait-elle eu peur ? Que je n'assume pas mes responsabilités ? Elle me connaissais assez pour savoir que je l'aurais fait...

-Oh et t’inquiète pas, je vis très bien le fait d’être un monstre sanguinaire, merci de me le demander.

Pourquoi fallait-il qu'elle soit cynique en cet instant ? Comment voulait-elle que je réagisse ? J'étais presque né pour la tué à présent cependant je m'en sentais incapable. Je me sentais coupable et je savais que tous les vampires n'étaient pas foncièrement mauvais. Je voulais l'aider mais avant, je voulais qu'elle finisse ses explications. Je relevais pas le pic de Juliet-Grace et demandai :

-Pourquoi tu ne m'as rien dit ? Pourquoi...? Tu sais très bien que j'aurais pris mes responsabilités. Tu me connais assez non ?

Je posai ma question et l'observai abaisser les paupières de sa victime dont le ventre était gonflé. Une femme enceinte. Que venait-elle de faire ? Mon amie n'avait pas fait seulement une victime ce soir, mais deux.

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    La jeune vampire entendait le cœur de Kiprian battre à toute allure. Il était soit effrayé, soit furieux. Peut-être un peu des deux. Elle n’arrivait pas à décoder les émotions de cet homme qu’elle connaissait pourtant si bien. Pas plus qu’elle n’arrivait à comprendre les siennes à vrai dire. Juliet-Grace soupira et détourna son regard du corps de Liv.

« Je n’ai rien dit parce que tu n’allais pas bien, répondit-elle pour se justifier. J’ai repoussé le moment de t’annoncer ma grossesse parce que je voulais mieux pour notre enfant. Et puis il y a eu ce soir-là où tout a dérapé et c’était trop tard, dit-elle à nouveau les larmes aux yeux. Elle détestait donner cette image de gamine hystérique, surtout en cet instant, mais c’était plus fort qu’elle. Elle respira un grand coup et continua : Je sais que tu aurais assumé, mais est-ce que tu aurais réussi ? Peut-tu m’assurer qu’à l’époque tu étais apte à t’occuper de moi et de mon enfant ? Et puis est-ce que tu serais parti te soigner si je te l’avais annoncé ? C'est parce que je te connais que je n'ai rien dit. »

Elle connaissait d’avance la question qu’il allait lui poser ensuite. Pourquoi était-elle partie ? C’était ce qu’elle ne cessait de se demander ces dernières années. Il aurait été facile de se dire que Jon l’avait convaincu, mais c’était faux. Si les arguments de son protecteur avaient penchés dans la balance, Juliet-Grace savait qu’elle n’aurait jamais quitté Mystic Falls si elle ne l’avait réellement souhaité. Peut-être était-elle partie parce qu’elle avait cru qu’il serait plus simple pour elle de guérir loin des questions de ses proches. Peut-être parce que pour la première fois de sa vie, elle avait la possibilité de s’échapper aux bras d’un homme qu’elle ne connaissait ni d’Adam ni d’Eve pour vivre une vie de pure liberté. Peut-être parce qu’elle ne se sentait pas capable de passer devant le cimetière tous les jours et de continuer à marcher sans s’effondrer.
Pour toutes ces raisons et un million d’autres elle était partie. Elle se disait qu’après tout, elle avait une éternité pour revenir sur ces pas. Qu’en plus, elle n’avait jamais eu l’intention de finir sa vie à Mystic Falls. Cependant, il était dur d'arracher ses racines comme ça et plus le temps passait plus elle avait eu envie de rentrer. Mais plus le temps passait, plus il lui était dur d’envisager sur ses pas.
Au début ça avait été simple. Jon était avec elle, il l’aimait et l’aidait. Mais quand ce dernier était mort, Juliet-Grace c’était retrouvée seule avec ses pulsions qu’elle ne pouvait plus contrôler et sa culpabilité. Elle voulait rentrer, mais sa vie à la Nouvelle-Orléans lui plaisait tellement,  qu’elle en avait oublié le fait que seule elle était éternelle, pas ses amis ou même sa famille. Au fond d’elle, elle était morte de trouille de rentrer. Parce qu’il faudrait fournir des explications sur son départ soudain. Ils demanderaient où son enfant était. Plus que tout, elle avait craint la réaction de Kiprian, car elle savait que si elle le croisait, elle ne pourrait pas tout garder pour elle. Il avait fallu qu’elle éteigne son humanité pour arrêter d’avoir peur et remettre timidement un pied dans sa ville natale. Tout est plus simple quand on ne craint plus rien, ni la mort, ni la vie.
Mais comment expliquer tout ça à Kiprian. Il méritait une réponse, mais elle ne pouvait pas lui en fournir.

« Quand je suis devenue un vampire tu n’étais pas là non-plus et mes parents m’avaient tourné le dos. Je ne savais pas quoi faire, alors je suis partie, dit-elle enfin. Elle pensait avoir énormément changé depuis la dernière fois qu’ils s’étaient retrouvés face à face. Pourtant en cet instant, elle se sentait comme l’ancienne Juliet-Grace. Ils t’ont entrainé, je le sais, ajouta-elle avec de l’amertume dans sa voix. Je me doute qu’ils t’ont bassiné de contes sur les vampires, comme quoi nous sommes des monstres sans humanité et irrécupérable. Qu’il vaut mieux nous achever. Mais j’ai besoin de toi Kiprian, j’ai besoin de mon meilleur ami. Je suis différente, mais pas autant que tu ne le crois. Laisse moi m’expliquer, finit-elle par dire. »

Mais qu’avait-il à expliquer réellement ?

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    Je la regardais faire. Son geste était humain dans un sens. Un monstre dénué de toute humanité n'aurait pas pris le soin de fermer les yeux de sa victime. Il serait parti sans demander son reste. Cependant je restais sous le choc de ce geste. De l'identité de sa victime et du diamètre de son ventre. A en croire l'arrondis de son bas ventre, la jeune fille étendue au sol en était à six ou sept mois. Elle arrivait bientôt à terme. Du moins, elle y était presque avant de croiser le chemin de Juliet-Grace. Je réfléchissais à toute vitesse. Au fond de moi je m'accrochais au fait que ça soit un hasard mais je ne pouvais m'y résigner totalement. Ce double assassinat était volontaire. C'était logique. Elle disait avoir été enceinte avant sa transformation... Juliet Grace me coupa dans ma réflexion :

-Je n’ai rien dit parce que tu n’allais pas bien. J’ai repoussé le moment de t’annoncer ma grossesse parce que je voulais mieux pour notre enfant. Et puis il y a eu ce soir-là où tout a dérapé et c’était trop tard.

Elle voulait le mieux pour son enfant. Ca lui ressemblait enfin, pas comme son comportement de ce soir. Je la connaissais suffisamment pour savoir que la perte de son enfant l'avait terriblement affectée psychologiquement. Mon amie ne m'en avait pas parlé avant cette nuit et ça me blessait. J'étais blessé de me dire qu'elle n'avait même pas tenté de contacter son meilleur ami. Moi. J'étais froisser par ce manque de confiance mais ce n'était pas ce qui me touchait le plus. Ce qui me préoccupait le plus, ce n'était pas la victime mais Juliet-Grace. Quelque chose me poussait à croire que ce n'était pas la première femme enceinte qu'elle tuait et que ce n'était pas non plus la dernière...

-Je sais que tu aurais assumé, mais est-ce que tu aurais réussi ? Peut-tu m’assurer qu’à l’époque tu étais apte à t’occuper de moi et de mon enfant ? Et puis est-ce que tu serais parti te soigner si je te l’avais annoncé ? C'est parce que je te connais que je n'ai rien dit.

Certes je n'aurais peut-être pas accepté aussi facilement d'aller dans le New Jersey si il s'était avéré que j'étais père mais... Elle aurait pu me le dire à mon retour au lieu de s'enfuir. Pourquoi était-elle parti si elle était si sûre de ma paternité ? J'étais rentré à Mystic Falls aussi sobre que possible et avec la ferme intention de ne plus toucher à la drogue... Elle n'était même pas là pour constater que j'allais mieux. Je lui en avait voulut un certain temps pour cette absence et pour ce voyage que je savais bidon à présent. Je lui en avait voulut d'être parti sans rien dire... Aujourd'hui je lui en voulait de m'annoncer sa grossesse, ma paternité et la mort de notre enfant en une soirée. Son histoire se tenait et elle n'était pas assez idiote pour inventer une histoire pareil, même vampire. Juliet-Grace avait gagné : je la croyais.

-Quand je suis devenue un vampire tu n’étais pas là non-plus et mes parents m’avaient tourné le dos. Je ne savais pas quoi faire, alors je suis partie. Ils t’ont entrainé, je le sais. Je me doute qu’ils t’ont bassiné de contes sur les vampires, comme quoi nous sommes des monstres sans humanité et irrécupérable. Qu’il vaut mieux nous achever. Mais j’ai besoin de toi Kiprian, j’ai besoin de mon meilleur ami. Je suis différente, mais pas autant que tu ne le crois. Laisse moi m’expliquer...

Ces dernière paroles me ramenèrent à ma réflexion de tout à l'heure. Je connaissais Juliet Grace et ce n'était pas une coïncidence si sa victime attendait un enfant. Je laissais les reproches de côté. C'était ridicule face à la gravité de son action. J'avais l'intention de l'aider et elle me la demandait d'elle même. Je devais lui faire croire qu'elle était irrécupérable. Que c'était un monstre et que même un ami ne pourrait rien pour elle. Je plantais mon regard sur elle et demandais avec fermeté :

-C'est une femme enceinte ? Dis moi, Juliet Grace, ta victime portait un enfant ? Elle était heureuse, le père aussi l'était ? Ils avaient une descendance désirée... C'était une famille ! Dis le !

Les larmes que j'avais vu se remettre à couler précédemment, reprenaient de plus belle. Elles coulaient à flot sur ses joues. Je pouvais paraitre horrible. Je la secouais. Je la malmenais psychologiquement en hurlant mes paroles. Il fallait qu'elle prenne conscience de ses actes et le lui dire était la meilleure solution. Je l'aidais. C'était la première phase du retour de son humanité même si cela entrainait qu'elle me déteste de faire ça.

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Il ne sait pas encore qu'un peu de lui est mort avec moi cette nuit

    Sa fille aurait dû s’appeler Ada.
Liv avait dix-sept ans et rêvait de devenir pianiste professionnelle. Elle avait obtenu une place dans une grande école de musique à New York, mais elle tombée enceinte peu avant. Malgré tout, elle avait confessé à Juliet-Grace que si tout cela était totalement imprévu, elle ne regrettait rien et attendait de voir le visage de sa fille avec impatience. Après tout, amis, famille… tous la soutenaient. Sa carrière pouvait bien attendre un an.

Plus elle en avait appris sur cette jeune femme, plus Juliet-Grace l’avait détesté avec une rage inexplicable. Peut-être parce que cette fille avait tout ce qu’elle même n’avait jamais eu la chance d’avoir : du soutient, la certitude que sa vie reprendrait son cours quoi qu’il arrive. En réalité, Juliet n’avait jamais tué par plaisir, mais par pure jalousie. D’une certaine façon, c’était encore pire.

« C'est une femme enceinte ? Dis moi, Juliet Grace, ta victime portait un enfant ? Elle était heureuse, le père aussi l'était ? Ils avaient une descendance désirée... C'était une famille ! Dis le ! »

Elle ne comprenait plus ce qu’il se passait. Jamais Kiprian et elle n’avaient eu de dispute aussi violente. Qu’il lui crie dessus était la dernière chose dont elle avait envie, mais sans qu’elle le sache, c’était la chose dont elle avait besoin. La secouer et la mettre en face de ses actes était peut-être une bonne idée, mais cela ne servit qu’à la braquer encore plus. Elle se dégagea et continua à s’essuyer rageusement le visage sans dire un mot. Le sang avait séché et se décollait au fur et à mesure qu’elle grattait. Elle détestait ça, elle détestait perdre ses moyens ainsi, elle détestait Kiprian qui l’embêtait avec ses questions stupides.

« Oui elle l’était, ça te va comme réponse ? Hurla-t-elle. Elle allait avoir un enfant et une belle vie. Tout ce que j’aurais du avoir. J’ai tué Liv parce que je suis morte. Parce qu’elle aurait eu la vie que je voulais et l’enfant que j’aurais du avoir et que je ne pourrai jamais avoir. »

C’était la vampire qui n’avait pas retrouvé toute son humanité qui parlait. Celle avait fait de mauvaises choses, le savait mais vivait avec. L’admettre à voix haute, c’était comme sentir à nouveau la lame qui l’avait tuée se planter trois fois dans son ventre. Se confesser ne retire aucun poids, ne rend en rien la conscience plus légère, se dit-elle. Tout ça c’était des conneries, ça ne rendait que plus réel le meurtre qu’elle venait de commettre, ça ne rendait que plus palpable le sentiment de culpabilité qui la rongeait. Elle revoyait tous les visages de toutes les femmes qu’elle avait tué. Ironiquement, qu’elles portent la vie leur avait apporté la mort. Juliet-Grace saisit alors l’ampleur de ce qu’elle avait commis.

« Oh mon Dieu, Kiprian je l’ai vraiment fait. Je l’ai tué elle et les autres. Pourquoi j’ai fait ça ? »

Elle connaissait la réponse, mais soudainement, cette dernière ne lui convenait plus. Qu’était-elle devenue pour tuer par jalousie ? Eteindre son humanité l’avait empêché de devenir folle. Là, elle risquait de sombrer à coup sûr si quelqu’un ne la sortait pas du trou. Juliet-Grace avait toujours assumé ses actes. Mais quand ils étaient de l’ordre de ne pas faire ses devoirs où manger trois pots de glace alors qu’elle s’était promis de faire un régime. Tuer des gens s’était plus qu’elle ne pouvait en supporter.

« Je ne peux pas faire ça Kiprian. Je ne peux pas continuer. Soit je redeviens un monstre, soit je me tue. Il n’y a pas moyen que je vive avec. »

Non, plus jamais elle ne voulait revivre ça. Eteindre son humanité, c’était prendre le risque de se réveiller à nouveau un jour et ressentir encore une fois toute cette culpabilité, de prendre cette grande claque qui la mettait à genoux malgré la puissance que son état de vampire lui conférait. Alors elle se saisit du pieu qu’elle avait arraché des mains de Kiprian plus tôt et en appuya la pointe contre son cœur. Ses mains tremblaient. Elle devait le faire. Elle devait le faire pour Liv et Ada.

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Il ne sait pas encore qu'un peu de lui est mort avec moi cette nuit

    Je savais en l'agressant et en l'obligeant à avouer que ses réactions seraient fortes. Je la malmenais psychologiquement et c'était volontaire. Il fallait qu'elle se rende compte, qu'elle admette, pour mieux s'en sortir par la suite. Pour retrouver son humanité il fallait passer par là. Les gens oublient souvent -moi le premier- que les vampires, avant d'être des monstres étaient humains. Ils ont droit à l'erreur, comme nous. Certains sont irrécupérables et tuent depuis trop longtemps pour être sauvé mais d'autre, comme Juliet-Grace peuvent encore s'en sortir. J'en étais convaincu. Violemment, Juliet-Grace se dégagea. Vraisemblablement, le vampirisme l'avait rendu violente. Jamais nous n'avions eu d'agressions physiques ou verbales par le passé et ce soir il y avait eu les deux. Il fallait un début à tout. C'était dur de rester aussi sec mais il le fallait. Pour elle. Elle finit par admettre avec rage :

-Oui elle l’était, ça te va comme réponse ? Elle allait avoir un enfant et une belle vie. Tout ce que j’aurais du avoir. J’ai tué Liv parce que je suis morte. Parce qu’elle aurait eu la vie que je voulais et l’enfant que j’aurais du avoir et que je ne pourrai jamais avoir.

Liv. Elle connaissait son prénom. Mon amie avait donc été encore plus loin que je ne le croyais dans le sadisme et dans la cruauté. Elle avait suffisamment connu sa victime pour connaître son prénom et une partie de sa vie qu'elle enviait tant. Juliet-Grace avait gagné sa confiance avant de lui prendre la vie et de tuer par la même occasion son enfant. J'avais beau apprendre tout ça à son propos. J'avais beau l'assimiler de plus en plus à un monstre, elle restait toujours ma Juliet-Grace, ma meilleure amie depuis toujours. Humaine ou vampire elle serait toujours dans mon coeur et apprendre tout cela ne me donnait que plus envie de l'aider. Je senti le regard de mon amie se vider et son visage se décomposer d'un coup :

-Oh mon Dieu, Kiprian je l’ai vraiment fait. Je l’ai tué elle et les autres. Pourquoi j’ai fait ça ?

La peur. La panique. L'horreur. Des sentiments humains. Les premiers qu'elle apprenait à ressentir de nouveau. Sans le savoir elle avait fait un grand pas. Ma méthode avait marché. Cette phase était la plus compliquée. Il fallait qu'elle arrive à faire face à la sombre réalité des choses. Elle avait tué de nombreuses femmes enceintes. Elle avait donc ôté la vie de fœtus. Ils ne verraient jamais le jour par sa faute. La panique prenait le dessus peu à peu, je le voyais sur son visage. C'était comme si elle ressentait pour la première fois. Elle redécouvrait ce qu'était l'humanité.

-Je ne peux pas faire ça Kiprian. Je ne peux pas continuer. Soit je redeviens un monstre, soit je me tue. Il n’y a pas moyen que je vive avec.

Je détournais le regard quelques secondes. Ce fut une erreur. La panique de Juliet-Grace était amplifiée comme n'importe quelles émotions chez les vampires et je n'avais pas anticipé la chose. Mon amie s'était déjà emparée du pieu qu'elle m'avait ôtée des mains précédemment. Elle le braquait au dessus de sa poitrine comme je l'avais fais avant mais il n'y avait aucune marge de sécurité cette fois. Il fallait qu'elle tienne, c'était une battante. Juliet-Grace ne laissait jamais tomber et ce n'était pas aujourd'hui que ça changerait. Je m'approchais lentement, tandis qu'elle appuyait un peu plus fort au niveau de son coeur. Je plongeai mon regard dans le sien, toujours aussi effrayé. Je ne disais rien, laissant le silence faire les choses. Je déposais délicatement ma main droite sur sa joue et finis d'enlever le sang séché qu'elle avait tenté d'enlever frénétiquement avant. Mon amie était prise de tremblements. Je déposais un baiser sur son front. Ce geste pouvait être prit pour un adieu mais c'était tout le contraire. La diversion était un atout en attaque mais c'est aussi une force quand il s'agit de défendre ou te protéger. De ma main libre j'arrachai le pieu des mains de Juliet-Grace et le fourrai dans ma poche. Je pris alors son visage entre mes deux mains et la forçai à me regarder.

-La Juliet-Grace Overbey que je connais est une battante et je sais qu'elle est là quelque part. Si tu veux abandonner, abandonne mais il y aura toujours un petit chasseur pour te rappeler que tu n'es pas comme ça. Tu y arriveras... Et je serai là, quoiqu'il arrive.

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Il ne sait pas encore qu'un peu de lui est mort avec moi cette nuit

    C’est quand il arracha le pieu de ses mains, que Juliet se rendit compte que jamais elle n’aurait pu le faire. Elle aimait trop la vie qu’elle menait pour abandonner ainsi. Jusqu’à présent, elle s’était focalisée sur tous les malheurs que le vampirisme lui avait apporté : sa stérilité, sa soif, ses pulsions meurtrières. Mais d’un autre côté, devenir vampire, et même éteindre son humanité, lui avait permis de vivre la vie dont elle avait toujours rêvé. De faire ce qu’elle voulait, sans contraintes ou pression. Bien sûr avec la découverte de l’existence des vampires, retrouver cette vie serait un peu compliqué, mais Juliet savait que c’était une option.  
Pendant un moment, elle se laissa aller aux souvenirs qu’elle gardait de la Nouvelle-Orléans. Elle avait fait là-bas des choses dont elle n’était pas très fière. Mais c’était aussi dans le quartier français qu’elle avait goûté à une vie sans ennuis pour là première fois, juste après la mort de Jon. A l’époque elle n’avait de goût que pour la fête, pour oublier un peu les horreurs qu’elle avait endurés ses derniers mois. Combien de temps était-elle restée là-bas ? Trois mois, un peu moins peut-être. Les soirées se ressemblaient, seuls les visages changeaient. Elle avait tout de même laissé des amis là-bas, peut-être était-il encore temps d’y retourner. Tout serait plus simple : trouver une bague de jour et recommencer à zéro. Comme d’habitude, c’était Kiprian qui lui remettait les pieds sur Terre.

« La Juliet-Grace Overbey que je connais est une battante et je sais qu'elle est là quelque part. Si tu veux abandonner, abandonne mais il y aura toujours un petit chasseur pour te rappeler que tu n'es pas comme ça. Tu y arriveras... Et je serai là, quoiqu'il arrive. »

Elle retrouvait enfin le Kiprian qui lui manquait tant. Le meilleur ami qui la soutenait même quand elle faisait la pire bêtise du siècle et qu’elle appelait à la rescousse pour camoufler ses conneries. Bon le meurtre de plusieurs personnes, c’était peut-être un peu trop gros pour être qualifié de bêtise, mais l’important c’était que Kiprian était là. Il avait beau être un chasseur, il l’aiderait. Ceci acheva de la rassurer. Mais il lui restait tout de même cette petite dose d’inquiétude au fond d’elle même. S’il ne retrouvait pas la fille avec qui il avait partagé toute son enfance ? Etrange, voilà une heure qu’elle essayait de le persuader qu’elle était la même, pour se rendre compte qu’ils avaient tout les deux bien changé. Mais ses yeux avaient toujours la même teinte rassurante. Juliet-Grace soupira et posa ses mains froides contre celles de Kiprian. Parfois, elle oubliait qu’elle avait la chair d’une morte, si bien que les mains de son ami lui paraissaient bouillantes.

« Merci, soupira-t-elle, tu as raison, ce n’est pas mon genre d’en finir comme ça. Tu sais bien que je déteste faire dans le mélodrame, ajouta-elle en esquissant un petit sourire. Ne m’abandonne pas d’accord ? C’est arrivé trop souvent ces derniers temps, dit-elle en serrant un peu plus les mains de Kiprian. Il faut que je fasse quelque chose pour Liv. »

Ce simple prénom lui écorchait la bouche, mais elle ne devait pas l’oublier. Ça ne semblait pas juste de laisser un cadavre anonyme derrière elle. Jon lui avait appris à cacher les corps et quand elle avait éteint son humanité, elle n’avait pas ce genre de problèmes de conscience. Plouf, si Kiprian n’était pas arrivé, le corps aurait fini dans le lac. Mais maintenant, c’était différent, elle ne pouvait pas laisser cette pauvre adolescente ici, en attendant que quelqu’un la retrouve. Juliet-Grace n’était pas vraiment en possession de tous ses moyens, et elle savait qu’elle ne pourrait pas se retourner et refaire face au cadavre sans exploser. Pourtant, il fallait bien qu’elle le fasse.

« Je ne sais pas quoi faire, avoua-t-elle. »

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Il ne sait pas encore qu'un peu de lui est mort avec moi cette nuit

    Ma déclaration pouvait paraître clichée mais je suis comme ça. Une fois que je m'attache aux gens, je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour les aider par tout les moyens. Je fais tout pour les soutenir. Certaines personnes pensent que je perd mon temps mais il n'est question de rien d'autre que de fidélité dans ces cas là. Selon moi, réagir de cette manière signifie seulement que vous êtes un bon fils, un bon ami ou que sais-je... Rester auprès des personnes qui vous sont chères dans les pires moments restent la plus belle preuve d'amour. Ceux qui pensent différemment n'ont certainement rien compris au sens du verbe "aimer". Nos regards étaient toujours fixés l'un dans l'autre quand je reçu une décharge électrique. Le contact de ses mains glacées sur les miennes m'avait surpris.

-Merci tu as raison, ce n’est pas mon genre d’en finir comme ça. Tu sais bien que je déteste faire dans le mélodrame. Ne m’abandonne pas d’accord ? C’est arrivé trop souvent ces derniers temps. Il faut que je fasse quelque chose pour Liv.

Ses mains se crispèrent sur les miennes et elle les serra de plus en plus fort à mesure qu'elle parlait. On aurait dit qu'elle s'agrippait à sa bouée de sauvetage en plein océan déchainé. Sa bouée de sauvetage qui n'était autre que moi, son ami mais aussi le père de l'enfant qu'elle n'aurait jamais... C'était assez ironique comme situation. Dans un sens j'étais en partie responsable de la mort de Liv. Jamais Juliet Grace ne s'en serait prit à elle si elle n'était pas tombée enceinte de moi. Jamais je ne l'abandonnerai elle le savait mais cette fois je serai encore plus présent. Aussi bien pour elle que pour moi. Il fallait que je vive avec mon absence passée en tant que futur papa et ma connerie. Je n'aurais jamais du céder à mes pulsions il y à deux ans de cela... Sa voix c'était brisée en prononçant le prénom de sa victime. La tristesse. Elle était triste. Encore une émotion qui revenait. J'étais heureux de voir que peu à peu son humanité se redessinait. Il fallait passer par là, par ses sentiments si désagréables. Mon amie bougeait dans tous les sens mais jamais ne faisait face à sa victime. Je la voyais recommencer à trembler légèrement avant de me confier :

-Je ne sais pas quoi faire

Il fallait l'enterrer. Seulement, le cimetière était bien trop loin et comment expliquer à la famille que Juliet Grace l'avait tuée et que je m'étais rendu complice par la même occasion ? Nous ne pouvions pas mentir non plus. C'était peut être lâche mais la seule solution que je voyais était de l'enterrer sur place de la manière la plus humaine possible. Ensuite nous verrions comment procéder. Le problème à présent était que nous n'avions pas de pelle. A la main nous n'irions pas très loin, il fallait que je trouve une solution. Soudain je me rappelais de la cabane à outils près de la maison du lac. Je m'y était retrouver une fois, au milieu d'une fête, en charmante compagnie. La maison était à cinq minutes en courant. Je jetai un oeil à mon amie toujours figée sur place.

-Il faut qu'on l'enterre... Ne bouge pas, je reviens ne t'en fais pas.

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